Colloque 520 ACFAS 2023 – La perspective des enfants dans les recherches en contextes éducatifs de la petite enfance.

Responsables : Caroline Bouchard, Anne Clerc-Georgy, Christelle Robert-Mazaye, Marie-Claude Marchand* et Édith Allard*

Afin de soutenir les apprentissages et le développement des jeunes enfants, de nombreux travaux de recherche mettent l’accent sur les pratiques des adultes (éducateur·trice, enseignant·e, etc.) qui œuvrent auprès d’eux en contextes éducatifs. Si cela s’avère pertinent et nécessaire, il ne faut pas occulter la perspective des enfants eux-mêmes, de manière à accéder, parallèlement, à leur compréhension du monde (Lavoie et al., 2020; Sommer et al., 2010, 2013). Les travaux centrés sur l’enfant se déclinent en divers niveaux d’implication de ce dernier dans le processus de la recherche. Ils peuvent considérer l’enfant comme objet de la recherche ou solliciter son point de vue, voire lui permettre d’y participer comme acteur à part entière (Lavoie et al.; 2020, Mazaye-Robert et al., 2021).

Accéder à la perspective des enfants, c’est d’une part mener des travaux qui font d’eux des partenaires de la recherche, mais c’est aussi les observer dans des activités comme le jeu, puisque c’est là que s’expriment leurs champs d’intérêt, leurs compréhensions, leur perspective même. Le jeu de faire semblant, une activité dans laquelle les enfants créent une situation imaginaire et interprètent des rôles qu’ils ont choisi d’investir (Clerc-Georgy et Martin, 2022), a une fonction de révélateur (Truffer, 2020). C’est un lieu particulièrement propice pour accéder à leur propre compréhension du monde et de leurs expériences, à une meilleure connaissance de ce qui les concerne réellement et du sens qu’ils construisent des situations proposées en contextes éducatifs.

Dans le cadre de ce colloque, divers travaux de recherches centrés sur la perspective des enfants au Québec et à l’international sont présentés. Il s’agit de faire dialoguer différentes méthodologies qui visent à accéder à la perspective des enfants : en l’observant dans ses jeux, comme le jeu de faire semblant, en jouant avec lui, en recueillant son point de vue ou encore en le ou la considérant comme cochercheur·se.

Résumé
Avec l’adoption de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) en 1989, l’Assemblée générale des Nations Unies reconnaissait aux enfants le droit d’exprimer librement leur opinion et de prendre part aux décisions qui les concernent dans tous les espaces de la société. Leur concédant plusieurs droits inaliénables, ce texte fondateur met en avant l’idée selon laquelle la parole des enfants est valide et doit être traitée avec sérieux. Dans le champ de la recherche, la prise en compte du point de vue des enfants s’accompagne souvent de l’idée selon laquelle ils sont les premiers détenteurs des connaissances au sujet de ce qu’ils vivent et les experts de leur propre monde. Ce regard sur les enfants invite les chercheur·e·s à faire de la recherche avec les enfants, et non plus sur les enfants (Colliver, 2017; Garnier et Rayna, 2017). Ce renversement de paradigme permet de reconnaitre et respecter l’agentivité des enfants, tout en assurant la construction de savoirs plus « authentiques » (Lavoie et al., 2020 ; Robert-Mazaye et al., 2021). Au-delà de la remise en question des pratiques des chercheur·e·s, faire de la recherche avec les enfants s’accompagne de défis épistémologiques, méthodologiques ou éthiques qu’il ne faut pas négliger. C’est sur ces enjeux que nous nous pencherons lors de cette conférence d’ouverture afin d’ouvrir un espace de réflexion partagée qui guidera les échanges tout au long de la journée. 

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En guise d’ouverture du colloque ACFAS-520 – La perspective des enfants dans les recherches en contextes éducatifs de la petite enfance, Christelle Robert-Mazaye nous partage cette vidéo de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse Québec.
Les enfants parlent des droits qui leur sont garantis par la Convention relative aux droits de l’enfant.

Elle nous invite également à consulter la Déclaration de Singapour sur l’intégrité en recherche.

BLOC 1 – OBSERVER L’ENFANT EN CONTEXTE AUTHENTIQUE

Résumé
Pour accéder à la perspective des enfants,  à leur compréhension du monde (Lavoie et al., 2020 ; Sommer et al., 2010, 2013) le jeu de faire semblant est une activité particulièrement propice. En effet, dans les situations imaginaires créées par les enfants, ces derniers investissent ce qu’ils saisissent de ce qui leur est proposé dans leur environnement  et l’expérimente de différentes façons pour mieux le comprendre (Clerc-Georgy et Martin, 2022.  C’est pourquoi, le jeu de faire semblant  a une fonction de révélateur pour l’adulte qui l’observe (Truffer, 2020). C’est un lieu particulièrement propice pour accéder à leur propre interprétation et compréhension du monde de leurs expériences, à une meilleure connaissance de ce qui les concerne réellement et du sens qu’ils construisent à partir notamment des situations proposées en contextes éducatifs. Dans cette communication, nous présenterons quelques “histoires de jeu” dans lesquelles nous avons reconstruit la perspective des enfants à partir d’observations de jeux libres dans des classes enfantines. 

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Résumé
Afin de mieux comprendre les effets de l’accompagnement de l’enseignant.e sur le développement de la pensée de l’enfant en contexte de jeu de construction à la maternelle 4 ans, nous avons réalisé une collecte de données au printemps 2022 auprès de 27 enfants répartis dans 15 classes de maternelle 4 ans au Québec. La méthode de collecte de données consistait en l’observation de manifestations observables du développement de la pensée des enfants, à partir de captations vidéos réalisées avant et après une intervention sur le jeu de construction guidé. Au cours de cette présentation, trois considérations liées à l’observation de la pensée des enfants à partir de captations vidéos seront abordées. D’abord, nous nous questionnerons sur ce qui amène le chercheur à choisir l’observation comme méthode de collecte de données dans un projet de recherche. Ensuite, nous discuterons des raisons pour lesquelles il peut s’avérer intéressant, voire nécessaire, d’avoir recours aux captations vidéos pour l’effectuer. Finalement, nous présenterons les principaux défis vécus en lien avec l’observation et l’utilisation de captations vidéos dans ce projet. Il est souhaité que cette présentation de nature méthodologique suscite des réflexions permettant aux chercheur.e.s de bien se préparer à l’utilisation de cette méthode de collecte de données et, par le fait même, de limiter la présence de certaines difficultés pouvant y être associées afin d’optimiser l’analyse des données recueillies.

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BLOC 2 – QUESTIONNER L’ENFANT DANS LE CADRE D’ENTRETIENS

Résumé
Pour accéder à la perspective de l’enfant, les conversations de terrain liées à une observation participante permettent d’entrer en matière : on demande des explications sur ce qui se passe ou pas, on converse parce qu’on participe. Lorsque les enfants explicitent ce qui se passe entre eux, l’adulte peut se présenter comme l’étranger qui pose des questions pour comprendre ce qui est en train de se vivre. Dans cette optique, l’enfant est un acteur social à part entière (Sirota, 2006). Dans cette communication, nous présenterons des extraits de conversations à partir desquelles surgit une rencontre, parfois furtive, entre co-chercheurs (enfant – adulte).

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Résumé
L’éducation par la nature (ÉPN) s’actualise notamment par la fréquentation régulière et prolongée de milieux naturels de proximité (boisé, champ, etc.). Huit principes encadrent cette approche, dont celui d’une pédagogie dite émergente, centrée sur l’exploration et le jeu initiés par l’enfant. L’adulte ajuste ainsi ses interventions à ce qui émerge de l’activité des enfants (p. ex. leurs questionnements, réflexions), pleinement engagés et inspirés par le contact avec la nature et la présence de matériaux libres et polyvalents (branches, eau, etc.; Couttet et al., accepté). La prise en compte de la perspective de l’enfant est inhérente à la posture de l’adulte en ÉPN. Elle inspire également les travaux de recherche sur le sujet. Néanmoins, plusieurs défis et contraintes se posent sur le plan méthodologique pour étudier la perspective du jeune enfant en ÉPN. L’objectif de cette présentation consiste à faire état de la démarche poursuivie dans le cadre de deux projets visant à recueillir les perceptions des enfants sur leur expérience en ÉPN. Ces projets ont été réalisés auprès de deux, puis de 27 enfants entre 3 et 5 ans fréquentant des CPE, au Canada. Ils se distinguent par la taille de l’échantillon et par le statut de la personne qui a recueilli le point de vue des enfants (une personne externe VS les éducatrices des enfants). Cette présentation explicitera plus amplement les enjeux méthodologiques vécus dans ces deux projets et ouvrira vers des perspectives de recherche.

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BLOC 3 – INTERAGIR AVEC L’ENFANT DANS SON GROUPE, SA CLASSE, ETC.

Résumé
De la perspective d’un enfant, jouer correspond à un moment agréable dont l’activité, l’endroit où elle se déroule (Howard et al., 2006) et la manière dont il souhaite transformer le matériel mis à sa disposition (Keung et Fung, 2021) sont choisis librement. Également, de son point de vue, jouer implique des interactions avec son environnement physique et social (Keung et Fung, 2021; McInnes et al., 2010). Ces interactions favorisent son engagement, ses apprentissages et son développement (Bodrova et Leong, 2011; 2019; Fleer, 2015). Au cœur de son jeu, l’enfant accepte l’adulte à la condition que celui-ci adopte un statut de partenaire et non de directeur de jeu (Ólafsdóttir et Einarsdóttir, 2019; Pyle et Alaca, 2018). Dans cet espace partagé où chaque partenaire, enfant·s et enseignant·e, s’engage, s’ajuste à l’autre et où le jeu se co-construit, qu’en est-il de la dynamique de l’engagement enfant·s-adulte ? Cette communication a pour objectif de 1) présenter la complexité, la singularité et la réciprocité de la dynamique de l’engagement enfant·s et enseignant·e en situation d’un jeu partagé de faire-semblant; 2) réfléchir à l’utilisation des approches historico-culturelle (Vygotski, 1997) et mosaïque (Clark, 2017) pour documenter la perspective de l’enfant au cours de cet engagement réciproque et; 3) soulever des enjeux éthiques et méthodologiques, contrebalancés par la pertinence d’apposer un regard d’acteur social sur l’enfant (Einarsdóttir, 2019).

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Résumé
Le collectif d’apprentissage, dans un contexte scolaire et avec le guidage de l’enseignant, permet de construire ensemble des apprentissages, mais cette construction n’est pas automatique, pour cela il faut un accompagnement, un étayage (Bruner 1978) réfléchi et conscient mené par une personne experte . Pour accéder à la perspective et la compréhension des enfants, le questionnement métacognitif (Portelance et Ouellet  2004), la gestion dialogique des interactions et la mise en œuvre de conversations exploratoires (Mercer, 2013) semblent des gestes propices pour accéder à la perspective des élèves. Dans cette communication, nous présenterons quelques extraits d’interactions menées dans un collectif de l’entrée dans l’écrit durant lequel les enfants sont initiés à la fois à la lecture et à “l’apprendre ensemble”. Nous dégagerons, à titre d’exemple, des interventions de l’enseignante qui semblent propices à l’accès à la perspective des enfants et à leurs processus d’apprentissage. 

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BLOC 4 – LA RECHERCHE AVEC LES ENFANTS

Résumé
Pour assurer leur développement et leur bien-être, les enfants s’appuient sur certaines personnes de leur entourage qui constituent leur réseau interpersonnel – RI – (Antonucci et al., 2004 ; Levitt, 2005). La recherche indique que le RI regroupe des partenaires divers (issus de la famille, de l’école et du voisinage) et assure trois fonctions : le soutien, la socialisation et les soins (Boosman et al., 2002 ; Furman et Buhrmester, 1992). S’il prend forme dans leur quotidien, le RI traduit une appropriation par les enfants de leur univers social, laquelle s’organise autour de logiques subjectives variées (Robert, 2010). De cette manière, le RI constitue une voie d’accès privilégiée à l’agentivité des enfants, témoignant d’un travail de construction et d’élaboration reflétant leur activité comme sujets (Robert et Beaumatin, 2010). Pourtant, peu d’études se sont intéressées à cette question sans utiliser les adultes comme sources d’information, considérant le point de vue des enfants peu fiable et versatile. À l’aide d’un dispositif mêlant entretiens semi-directifs et scénettes, nous avons mené une recherche avec 32 enfants (19 filles, 13 garçons) de maternelle en France (âge M = 53,38 mois). En adoptant une méthodologie adaptée aux intérêts et compétences des jeunes enfants, nous avons pu comprendre sur quoi iels s’appuient pour identifier les partenaires de leur RI, mettant en avant des logiques différentes de celles que les adultes avaient tendance à repérer.   

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